Mythologie et croyances berbères

 

La mythologie berbère et les croyances berbères concernent les croyances des premiers Berbères d’Afrique du Nord. Celles-ci sont influencées, et ont elles-mêmes influencé les croyances des autres peuples de la région : Phéniciens, Grecs, Romains.

 

Croyances concernant la mort :

  • Tombes et pratiques funéraires : 
Medghassen
 
Les Berbères et leurs ancêtres (Capsiens et Ibéromaurusiens) croyaient à la vie après la mort. Tout d’abord, ils enterraient leurs morts dans des trous à même le sol. Quand ils se rendirent compte que les animaux pouvaient les déterrer, ils se mirent à les brûler, dans des trous plus grands. Plus tard, ils ont brûlé les corps dans des tombeaux, tumulus, monuments funéraires en pierres, et autres tombes. Ces tombes, d’abord simples, ont évolué vers des formes plus élaborées, comme les tombes pyramidales, dans lesquelles n’étaient enterrées que les personnalités les plus importantes. La pyramide berbère la plus connue est celle de Medghassen.
L’archéologie révèle que les corps des morts étaient peints en rouge, pratique d’origine capsienne. Ils étaient enterrés avec des œufs d’autruche, des bijoux et des armes. Ils pouvaient être enterrés dans un linceul ou brûlés en position fœtale. Les Guanches quant à eux momifiaient leurs morts.

  • Le culte des morts : 
Temple de Siwa
 
Le culte des morts chez les Berbères était différent de celui des autres peuples antiques. Pomponius Mela rapporte que les Auguléens divinisaient et vénéraient leurs ancêtres. Lorsqu’ils les invoquaient afin de leur demander quelque chose, ils dormaient dans leurs tombes pour que leur réponse arrive durant le sommeil.
 
Hérodote remarque la même pratique parmi les Nasamons, habitant autour de Siwa et Augila : « Voici leur manière de faire des serments et d’exercer la divination. Ils posent la main sur le tombeau des hommes qui parmi eux ont la réputation d’avoir été les plus justes et qui sont considérés comme ayant été des gens de bien, et jurent par eux. Pour exercer la divination, ils se rendent aux tombeaux de leurs ancêtres ; ils y font leurs prières, et y dorment ensuite. Si, pendant leur sommeil, ils ont quelque songe, ils en font usage dans leur conduite. »

  • Le culte du sacrifice :
 
Pendant la Numidie, à N’Gaous dans les Aurès, plusieurs stèles africaines (Molchornor « sacrifice d’un agneau » ou stèles de Saturne avec mention d’un sacrifice particulier) ont été trouvées par les chercheurs et signalées par les historiens.
 
 
Autres croyances :

  • La culture mégalithique :
Le cromlech de Mzora au Maroc.
 
Pour les Berbères, comme pour beaucoup de peuples préhistoriques, la roche est sacrée. Il existe plusieurs sites en Afrique du Nord, dont le plus connu est le cromlech de Mzora (ou Msoura).
Le monument de Mzora est composé de cercles de mégalithes entourant un tumulus. Le plus grand d’entre eux culmine à plus de cinq mètres de hauteur. Selon la légende, il s’agit de la tombe du mythique roi libyen Antée.

  • Cultes du Soleil et de la Lune :
Gravures du massif de Toubkal de plus de 8000 ans, au sud de Marrakech, appelée la plaque du soleil. 
 
En berbère la lune et le dieu lunaire portent le même nom : Ayyur. Hérodote mentionne que les Berbères antiques vénéraient la lune et le soleil, auxquels ils offraient des sacrifices : « Les sacrifices des nomades se font de cette manière : ils commencent par couper l’oreille de la victime (cela leur tient lieu de prémices), et la jettent sur le faîte de leurs maisons ; cela fait, ils lui tordent le cou : ils n’en immolent qu’au Soleil et à la Lune. Tous les Libyens font des sacrifices à ces deux divinités ». D’autres auteurs attestent ce culte, ainsi que des graffitis, comme un « Solo Deo Invicto » relevé à Thagaste.

  • Croyances partagées avec les Égyptiens :
Amon l’inconnaissable, le caché.
 
Les Égyptiens de l’Antiquité étaient les voisins des Berbères, et leurs mythologies partagent de nombreux traits. Les Berbères antiques orientaux vénéraient Isis et Seth, comme le montre ce passage d’Hérodote : « [Les libyens] ne mangent point de vaches, non plus que les Égyptiens, et ne se nourrissent point de porcs. Les femmes de Cyrène ne se permettent pas non plus de manger de la vache, par respect pour la déesse Isis, qu’on adore en Égypte ; elles jeûnent même, et célèbrent des fêtes solennelles en son honneur. Les femmes de Barcé non seulement ne mangent point de vache, mais elles s’abstiennent encore de manger de la chair de porc. »
 
Osiris était lui aussi vénéré en Libye, et pour Budge (et d’autres universitaires), Osiris serait d’origine libyenne : « Toutes les sources connues concernant Osiris montrent que c’était à l’origine un dieu de l’Afrique nord-orientale, peut-être de Libye. »
 
De leur côté, les Égyptiens reconnaissaient l’origine libyenne de Neith, venu selon leur mythologie depuis la Libye pour s’établir dans le delta du Nil. Certains portraits de dieux égyptiens, comme Ament, les montrent pourvus d’attributs et bijoux typiquement berbères.
Le dieu commun le plus remarquable est cependant Amon, peut-être le plus important des dieux berbères. Honoré par les Grecs de Cyrénaïque, il a été unifié à Baal suite à l’influence libyenne. Le plus grand temple libyen dédié à Amon est celui de l’oasis Siwa. Les noms Garamantes et Nasamons, désignant deux tribus berbères antiques, pourraient également provenir du nom de ce dieu.

  • Croyances partagées avec les Phéniciens :

 

Tanit est une déesse d’origine berbère reprise par les Phéniciens.
 
Les Phéniciens, fondateurs de Carthage en -814, se sont retrouvés à partir de cette date en contact avec les Berbères. Dans un premier temps, ils ont conservé leurs dieux (dont les deux principaux étaient Baal et Astarté) et ont évité les Berbères. Cependant, après la défaite d’Himere, les Carthaginois s’allient avec les Berbères, et leurs mythologies tendent à se confondre : le dieu libyen Amon devient Baal-Amon, Astarté est remplacée par Tanit, etc.

  • Croyances partagées avec les Grecs :
Méduse la libyenne.
 
Les Berbères et les Grecs de l’Antiquité sont entrés en contact en Cyrénaïque. Là aussi, les influences ont été réciproques. Leurs relations, d’abord marquées par la paix, connaissent un tournant après la bataille d’Irassa.
Mais si on prend considération le faite qu’Athéna a conquit le monde hellénique et y fonde sa capital, cela signifie que les contactes entre les Berbères et les Grecs étaient bien plus ancien, on parle alors de protoberbère voir de libyen, leurs ancêtre qui aurait certainement transmis leur croyances aux Grecs. Des divinités comme Poséidon, Athéna, Triton, Amphitrite, Atlas et bien d’autre était aussi bien connue des Grecs que des Libyens (Berbère). Le lien entre croyances Berbères et Grecs semble très proche.

  • Avant la bataille d’Irassa (-570) :
Triton divinité libyenne affilié à Poséidon.
 
Le premier aspect notable de l’influence libyenne sur les croyances gréco-cyrénaïques est le nom « Cyrénaïque » lui-même. À l’origine, celui-ci désigne une figure légendaire berbère, une femme guerrière, connue aussi sous le nom de « Cyre ». Selon la légende, Cyre était une courageuse chasseuse de lion. Les émigrants grecs en firent, aux côtés d’Apollon, leur déesse protectrice.
Les Gréco-Cyrénaïques semblent également avoir adopté quelques habitudes et coutumes libyennes, car il ne leur était pas interdit d’épouser des femmes berbères. Hérodote (Book IV 120) rapporte que les Libyens ont apppris aux Grecs la manière d’arnacher quatre chevaux à un attelage. Les Gréco-Cyrénaïques construisirent des temples pour le dieu libyen Amon, au lieu de leur dieu habituel Zeus. Plus tard, ils assimilèrent Zeus au dieu Amon. Et certains d’entre eux continuèrent à vénérer Amon. Le culte de ce dieu se propageait tant parmi les Grecs, que même Alexandre le Grand se déclara « fils de Zeus » dans le temple de Siwa, lequel était dédié au dieu Amon.
 
Les historiens antiques mentionnent que plusieurs divinités grecques étaient d’origine libyenne. Athéna, la fille de Zeus, était considérée par plusieurs historiens antiques de la même manière qu’Hérodotus, pour avoir été d’origine libyenne. Ces historiens prétendaient qu’à l’origine, celle-ci était honorée par les Berbères autour du lac Tritonis où, selon la légende libyenne, elle était née du dieu Poséidon. Hérodote écrivit qu’Aegis et les vêtements d’Athéna étaient typiquement ceux des femmes berbères. L’historien prétend même que Poséidon (le dieu grec de la mer) a été adopté par les Grecs et qu’à l’origine, il serait un dieu libyen. Il insiste sur le fait que personne ne vénérait Poséidon autant que les Libyens qui diffusaient son culte : « (…) leurs noms viennent des Pélasges ; j’en excepte Neptune, dont ils ont appris le nom des Libyens ; car, dans les premiers temps, le nom de Neptune n’était connu que des Libyens, qui ont toujours pour ce dieu une grande vénération. »
 
D’autres divinités sont liées à la Libye. Les Grecs en faisaient provenir Lamia, Méduse, la Gorgone et Triton. Ils croyaient également que les Hespérides étaient localisées au Maroc actuel. Le dieu Atlas, père des Hespérides, est associé par Hérodote aux montagnes de l’Atlas, que les Berbères vénéraient.

  • Après la bataille d’Irassa :
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Antée contre Hercules

Les bonnes relations entre Grecs et Libyens commencèrent à se détériorer sous le règne de Battus II. Battus II commença à inviter d’autres groupes grecs à venir en Libye, ce que ses sujets considérèrent comme une menace qui devait cesser. Les Berbères commencèrent à se battre contre les Grecs, avec parfois l’aide des Égyptiens ou des Carthaginois. Mais les Grecs gagnaient toujours.
 
 
Pour certains historiens, le mythe d’Antée est le reflet de ces guerres gréco-libyennes. Selon la légende, Antée était l’invicible protecteur des Libyens, le fils de Poséidon et de Gaïa, et le mari de la déesse berbère Tingis. Il protégeait les terres berbères jusqu’à ce qu’il fût défait par le héros grec Héraclès, qui prit Tingis pour femme et enfanta Syphax, dont quelques rois libyens, tel Juba I, revendiquaient la descendance. Bien que certaines sources le fissent roi d’Irasse, Plutarque rapporte que les Libyens l’enterrèrent à Tanger : « C’est là, [à Tanger,] disent les Africains, qu’Antée est enterré. Sertorius, qui n’ajoutait pas foi à ce que les Berbères disaient de la taille démesurée de ce géant, fit ouvrir son tombeau, où il trouva, dit-on, un corps de soixante coudées. » L’iconographie grecque distingue clairement Antée des Grecs en lui faisant porter de longs cheveux et une longue barbe, attributs typiques des Libyens de l’est.

  • Croyances partagées avec les Romains :
 
Tout d’abord alliée de la Numidie contre Carthage, la Libye finit par être annexée à l’Empire romain.
Il faut noté une particularité importante, les romains avaient pour habitude de s’accaparer les divinités étrangère lors de leur conquête.

  • Avant la romanisation : les dieux guerriers berbères
Déesse Ifru, origine du nom Afrique.
 
Les divinités guerrières des Berbères étaient Agurzil et Ifru. Afrique dérive d’Ifru.
Ifri, déesse de la guerre, très influente en Afrique du Nord, était considérée comme la protectrice des marchands et figurait à ce titre sur les pièces de monnaie berbères. Pline l’Ancien écrit qu’en Afrique, personne ne prenait de décision sans invoquer Africa (nom latin d’Ifri). Après la conquête romaine, elle figurait toujours sur les pièces.
Monnaie Berberie romanisé, au dos la déesse Africa.
 
Afrique ou Africa provient de Ifren, Ifri est une divinité berbère, le pluriel est Ifren. La traduction ou l’emprunt latin nous donne Africa (Afrique) qui a été une déesse Berbère avant la conquête des Romains. Dea Africa signifie déesse Africa et représente un symbole à l’époque romaine. Et aussi Ifri désigne les populations locales des Afers. Ifru symbolise les rites dans les cavernes pour protéger les commerçants. La grotte non loin de Constantine à Guechguech et la pièce de monnaie romaine indiquent le mythe de la protection. Ifru était une déesse solaire et en même titre un dieu des cavernes et protecteur du foyer. Ifru est une sorte de Vesta Berbère.
 
Gurzil (ou Agurzil) est une divinité à la tête de taureau, fils d’Ammon. Corippus mentionne un certain Laguatan, grand prêtre de Gurzil, combattant les Byzantins, qui l’auraient tué alors qu’il tentait de s’enfuir avec les icônes de Gurzil. Parmi les ruines de Ghirza, en Libye, se trouve un temple qui est peut-être dédié à Gurzil — d’où par ailleurs pourrait provenir le nom de la cité.

  • L’influence romaine :
Septime Sévère
 
Lorsque l’Afrique du Nord est rattachée à l’Empire romain, les Berbères commencent à vénérer les divinités romaines, comme Jupiter, appelé Mastiman, et rapproché d’Ammon. Saturne était également très craint, et, selon Tertullien, les Africains du Nord le vénéraient par des sacrifices d’enfants. Les historiens considèrent que ce culte se rapprochait plutôt du culte ancien de Baal que de celui de Saturne à proprement parler.
 
Lorsque Septime Sévère, d’origine libyenne, devient empereur, le culte de Tanit est introduit à Rome.
 


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