La symbolique du chiffre 40 dans les rites libyques

S’il y a bien une facette des rites libyques que nous avons tendance à négliger c’est la symbolique des chiffres. Pourtant les chiffres présents dans les rites libyques ne sont pas choisis au hasard. On retrouve, par exemple, très fréquemment le chiffre 40 dans les rites libyques agraires, de naissance ou de mort.

Les rites de naissances

Chez les berbères Nefzaoua du Ténéré tunisien, l’accouchement est entouré de nombreux rites comportant le chiffre 40. Avant l’accouchement, la parturiente se parfume afin que le bébé puisse sentir sa mère. Si sa mère ne le fait pas, le bébé devra être mis à l’écart de toute visiteuse agréablement parfumée pendant 40 pour éviter qu’il ne meurt. Le bébé doit également porter une fibule pendant 40 jours pour le protéger.

En ce qui concerne la femme en couche, son mari ne doit pas avoir de relation sexuelle avec elle durant les 40 jours qui suivent l’accouchement. Ce délai est jugé nécessaire pour que cette dernière puisse recouvrer force et santé. Tout au long de ces 40 jours la femme en couche reçoit la visite de sa mère qui veille à son bien-être. Peu avant l’accouchement la sage-femme donne à la parturiente une paire de ciseaux qui doit rester à portée de main pendant 40 jours (la paire de ciseaux permet de protéger cette dernière contre les maladies).

Les rites mortuaires

La mort d’une personne marque le début d’une période de deuil de 40 jours. La famille du défunt partage un repas de pain non levé avec parfois de l’huile et des figues sèches et 40 jours plus tard, un autre repas de seksau (couscous) marque la fin du deuil comme il symbolise l’espoir du champs ensemencé au matin des premiers labours.

En Kabylie, l’incubation (asensi), qui consiste à dormir sur la tombe du mort afin qu’il nous transmette des messages par le rêve, était pratiquée le 3ème et 40ème jours après le décès. Il était possible de le faire à un autre moment bien que cela était déconseillé car cela épuisait l’âme du défunt. Cette pratique faisait partie du travail de deuil.

En Égypte on enterrait le pharaon 40 jours après sa mort et on organisait une cérémonie religieuse de façon faciliter le grand voyage du défunt.

Les rites agraires

Dans certaines régions appauvries par l’été, la transhumance des bovins est nécessaire. Naguère encore, les villages faisaient un sacrifice au départ du troupeau vers l’alpage, et à son retour, c’est-à-dire au premier jour du printemps et 40 jours après le début de l’automne, au moment des premiers labours.

Le chiffre 40 correspond également à la durée de la période appelée “Awausso”. Il s’agit d’une période de forte sècheresse, considérée comme l’une des plus néfastes de l’année, durant laquelle on cherche à prémunir les animaux et à se prémunir contre les effets néfastes de la chaleur notamment par la baignade. La fin de Awausso annonce le début de l’automne.

Que signifie le chiffre 40 ?

Le chiffre 40 symbolise une période de transition, d’introspection, de retour sur soi qui précède un profond changement. 40 correspond au temps d’acceptation nécessaire pour opérer une transformation intégrale d’une situation, d’un cycle de vie. Le chiffre 40 correspond entre autre à la régénération. D’où l’importance, pour une femme en couche, de se reposer pendant 40 jours. Pour le bébé, les 40 jours sont nécessaires à l’acceptation de la vie extra-utérine mais peut-être également à l’acceptation d’un autre cycle de vie pour lui comme pour les défunts. Chez les égyptiens ces 40 jours correspondaient au temps de libération définitive de la conscience de l’être par rapport à ses habitudes et à ses attaches matérielles. Les 40 jours sont aussi important pour la famille du défunt car elle correspond à la période du deuil. Dans les rites agraires le retour des animaux 40 jours après le début de l’automne symbolise le retour de la fertilité et donc la mise en place d’un nouveau cycle agraire. Nous pouvons également voir Awausso comme une période de transition néfaste qui ouvre sur l’automne.

Le chiffre 40 dans les religions adamiques

Cette symbolisme du chiffre 40 a été reprise de nombreuses fois dans le christianisme, l’islam et le judaïsme. En effet 40 correspond aux 40 années de repentir d’Adam après sa prévarication, Elie marcha 40 jours et 40 nuits avant d’atteindre le mont Horeb et c’est 40 jours après sa naissance que Jésus fut présenté au Temple de Jérusalem pour sa purification légale. Le chiffre 40, dans le judaïsme et l’islam, correspond à l’âge mûr.

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