Si nous connaissons le récit de la rencontre entre Anzar et Libya, nous savons très peu de choses au sujet de notre mère, la magnifique Libya. Pour cause nous avons peu de document sur cette déesse libyque. Quoi de plus tragique pour un enfant de ne pas connaître ses parents ? Heureusement aujourd’hui grâce aux dédicaces latines laissées en l’honneur de la Dea Maura (la déesse maure) nous sommes en mesure de l’identifier.
À Albulae, actuelle Aïn Temouchen, nous avons retrouvé les ruines d’un temple dédié à la Dea Maura. Il s’agit d’une divinité propre aux libyques
Chapiteau du temple de la déesse Maura. Dessin de Louis Demaeght
Mais l’existence de Maura est également attestée à Saldae, l’actuelle Béjaia. Ici on retrouve deux dédicaces à la Dea Maura. Nos avons tout d’abord la dédicace à la « gens Maura » et à Jupiter faite par les juvenes de Saldae. « Gens » ici renvoit à la progéniture, la descendance et donc à la progéniture de Maura. « Gens Maura », renverrait à la nation maure. De plus dans les vers qui suivent et qui décrivent l’attitude des deux divinités (Jupiter et Maura), on retrouve le terme « alma » qui, dans un contexte poétique, signifie, « nourrissant, qui donne la vie ». Dans une autre dédicace à la Dea Maura retrouvée à Saldae, Maura est qualifiée de « numen Mauritaniae » sachant que le terme « numen » signifie dieu, déesse, génie. Maura serait en réalité la transcription latine de Tamaurt, la terre. Dans la dédicace à la gens Maura, le terme « alma » prend donc aussi bien le sens de « nourrissant » car c’est Tamaurt qui nous nourrit que le sens « qui donne la vie ». Tamaurt est donc la terre-mère. Dans le temple d’Anzar situé en actuelle Libye entre Tripoli et Pentapolis, nous retrouvons une statue de Libya coiffée d’une proboscis tenant une défense d’éléphant, une gerbe de blé et foulant un modium ou muid. La gerbe de blé et le muid renvoyant tous les deux à l’agriculture, ces deux attribus confirment le lien entre Tamaurt et Libya. Libya serait donc une déesse en lien avec l’agriculture.

En comprenant que Libya est en réalité Tamaurt certaines paroles prononcées dans Tislit n Wenzar prennent tout leur sens. En effet la fiancée qui s’offre nue à Anzar prononce les paroles suivantes: « La terre et moi, nous sommes co-épouses, nous avons épousé un homme sans l’avoir vu. ». Cette phrase montre bien que Tamaurt est l’épouse d’Anzar.
