Héra Déesse des Mères et du mariage

Héra est la Déesse Nekhbet ou Nekheb d’El-kab (primitivement Souban) en Egypte, il n’est ni correcte de la désigner comme Déesse hellénique ou égyptienne puisque Elle est universelle et avant tout libyque. Elle était la Déesse du Midi, opposée sans cesse à Ouadjit (Bouto), la Déesse du Nord de l’Egypte. Nekheb était représentée par un vautour coiffé du diadème atef et muni des emblèmes de la vie et de la sérénité entrelacés. On la montrait aussi planant au-dessus du pharaon, dont elle était la protectrice. On l’associait aussi au Nil et à ses bienfaits.

C’est la Reine des Dieux olympiens, fille de Cronos et de Rhéa, sœur et épouse de Zeus, dont elle eut Héphaïstos et Hébé. Elle était aussi mère d’Arès; mais elle le conçut seule, piquée de ce que Zeus avait seul produit Athéna (version hellénique contesté par la paternité de Poséidon envers Athéna). On attribue d’ordinaire à cette Déesse un caractère fier et jaloux et des haines implacables. Irritée de ce que le berger troyen Pâris lui avait préféré Aphrodite en adjugeant à celle-ci la pomme d’or, elle excita la guerre de Troie et s’acharna à la perte de cette malheureuse ville. Elle persécuta continuellement les nombreuses maîtresses de son époux, Io, Léto, Callisto, Sémélé, Alcmène, ainsi que les fruits de leurs amours, surtout Héraclès. Zeus, irrité de ses reproches continuels, la fit un jour suspendre avec une chaîne d’or entre le Ciel et la Terre. Héra était particulièrement honorée à Samos, à Argos, à Olympie, à Carthage et à Rome où on l’avait assimilée à Junon. On la regardait comme présidant aux mariages et aux accouchements. Le paon, type de la beauté et de l’orgueil, lui était consacré.
L’animal consacré à Héra était la vache ou plutôt la génisse (probable glissement d’attribut de la Déesse Rhéa); on lui en immolait des hétacombes. Plus tard on lui consacra le paon.

Les érudits ont proposé des interprétations radicalement opposées du personnage d’Héra. Elles sont, comme toutes les hypothèses qui prétendent remonter au caractère initial des Divinités et en faire des personnifications de forces de la nature, très arbitraires et contestables. Pour les uns, l’épouse de Zeus, Dieu du ciel, personnifie la terre; pour les autres l’air. Empédocle, Euripide, Plutarque, Creuzer, Welcker ont soutenu la première théorie; Platon, les stoïciens, Preller, la seconde. Schirenck, Gerhard et Boscher font d’Héra une divinité lunaire. De chacune des démonstrations proposées il n’y a lieu de retenir que la réfutation des autres.

La Déesse du mariage

Héra est, par excellence, la Divinité féminine. On place la menstruation, la grossesse, l’accouchement, sous son influence. On lui dédie les plantes qui sont réputées guérir les maladies féminines. D’une manière générale, elle est la protectrice des Femmes et surtout du mariage. La fête de ses noces avec Zeus était supposée identique à celle de l’institution du mariage. On l’appelait mariage sacré théogamie, gamélie; célébrée au printemps, elle était très répandue; en Argolide, sur le Cithéron, en Eubée, à Samos, en Crète, on y représentait un véritable mariage avec le cérémonial usuel. En Libye, le mois de cette fête était celui où l’on avait coutume de conclure les mariages; dans les contrées où se maintenait au moins symboliquement le mariage par capture, on simulait nu enlèvement d’Héra par Zeus. Comme Déesse du mariage, Héra est surnommée Teleia, Zygia, Gamélia.

On lui attribue une beauté égale à celle d’Aphrodite et d’Athéna; On vante surtout ses beaux yeux de vache; l’épithète Bôopis lui est constamment appliquée; c’est une beauté calme; son expression est chaste, digne et même sévère; c’est la femme qui n’a jamais connu que l’amour légitime; elle n’en admet pas d’autre chez ses protégés. La grande cause de ses querelles de ménage avec son mari est l’infidélité de celui-ci; des légendes locales expliquent ainsi la haine dont elle poursuit Io, Léto, Sémélé, Dionysos, Héraclès. Comme Déesse de l’accouchement, elle était surnommée Ilithye; plus tard, on fit des Ilithyes des filles d’Héra. Quelquefois on imagine une Héra nourricière, donnant le sein aux fils naturels de Zeus, Héraclès, Hermès et Dionysos, auxquels son lait procure l’immortalité.

Le mythe d’Héra est complètement développé dans les poèmes homériques, et c’est de ceux-ci que se sont inspirés les écrivains postérieurs et les artistes. La Déesse est fille de Cronos, donc soeur de Zeus; elle devient son épouse; elle est mère d’Héphaistos, d’Arès, des llithyes, d’Hébé. Le poète ionien la fait élever par Océan (Agaraw) et Téthys (Ténéré); les Argiens par les filles d’Astéria; les Arcadiens par Téménos, d’autres par les Heures. Son mariage, d’après certaines traditions, aurait été clandestin; Zeus serait venu la trouver déguisé en coucou. Les querelles de Zeus et d’Héra sont décrites dans l’Iliade.

Divinité jalouse et vengeresse

La Déesse conspire contre le Dieu souverain avec Poseidon et Athéna. Une fois même, Zeus l’aurait suspendue dans les nuages, chargée de lourdes chaînes et entraves. Des récits posthomériques firent concevoir à Héra plusieurs de ses enfants sans le concours de Zeus : Héphaistos, même Arès et Hébé, le monstre Typhaon ou Thyphaeus qu’elle enfante pour se venger de l’adultère de son époux avec Léto. La Déesse joue un rôle dans un très grand nombre de mythes qu’on trouvera exposés aux articles spéciaux (Nonnus les a presque tous réunis dans ses Dionysiaques).

Héra, quelles que puissent être ses dissentiments avec Zeus, demeure à côté de lui la Reine du ciel, la plus vénérée des Déesses olympiennes, assise auprès de Zeus sur un trône d’or; quand ils sont d’accord nul n’oserait leur résister. Elle commande à l’orage, à l’éclair; les Heures et Iris sont à son service. On l’adore particulièrement sur les hauts lieux, ce qu’exprime l’épithète d’Acraia. D’humeur belliqueuse, elle prend une part active à la guerre de Troie; elle est l’ennemie la plus acharnée de la cité de Priam. Les cultes locaux sont conformes à cette conception du poète. Desservis de préférence par des femmes, ils donnent aussi lieu à des danses guerrières, à des jeux chevaleresques (Argos, Egine, Elis, Olympie, Crotone), qui contrastent avec les fêtes fleuries du mariage d’Héra.

Culte dédié à Héra

Son culte est un de ceux qui étaient le plus universellement répandus en Grèce. On cite ses sanctuaires à Argos, Nauplie (source Kanathos), Mycènes, sur l’Arachneon, à Hermione, Tyrinthe, Midée, Epidaure, Egine, Corinthe, Mégare, Sicyone(deux temples), Phlionte, Aegium, Patras, Olympie, Elis, Sparte, Mantinée, Stymphale (trois temples, lieu d’éducation de la Déesse), Mégalopolis, Heraea, Athènes, Eleusis, Platées, sur le Cithéron, à Thespies, Coronée, Lebadée, Thèbes, Orchomème, Delphes, Crissa, Pharigae (en Locride), dans l’Eubée (qui lui était consacrée tout entière, particulièrement les monts Oche et Dirphys); dans plusieurs cités de Thrace, à Thasos, Byzance, Lesbos, Kyme (d’Eolie), Samos, Délos, Paros, Ténos, Amorgos, Astypalée, Cos, Mycale, Aphrodisias, Mylasa et Stratonice de Carie, à Rhodes, en Crète (Cnossos, Tylissos, Aptera); Termessos en Pisidie, à Paphos et Amathonte,etc., dans l’île de Chypre, à Naucratis, à Cyrène, dans plusieurs localités de Bithynie, de Paphlagonie, etc.; à Ithaque, Syracuse, Acra, Hybla, Thermes, Panonne, Sélinonte, Agrigente, Crotone, Sybaris, Métaponte, Tarente, Pandosia, chez les Hénètes, etc.

Le plus célèbre centre du culte d’Héra était Argos, que certains regardent même comme son berceau, remarquant qu’à Dodone et à Athènes l’épouse de Zeus s’appelait Dioné. Son temple le plus fameux était entre Argos et Mycènes sur la colline Euboia; c’est à lui que se rattachait le mythe d’Io transformée en génisse. On l’honorait sous différents vocables dans ses différents temples : Acraia, Prosymna, Anthéia, Basileis (souveraine), Energésia, Parthénos, etc. D’Argos, son culte avait rayonné sur toutes les cités environnantes.

A Corinthe, on la rapprochait de Médée, et les Minyens d’lolcos en faisaient la patronne de leur héros Jason. Sans racines dans l’Attique, où il était importé, son culte était au contraire très vivace autour du Cithéron béotien et dans l’île d’Eubée. Dans les îles, les épithètes variaient; le temple de Samos était extrêmement renommé; on le faisait dériver du culte argien, qu’il éclipsait presque par l’éclat de ses processions, de ses fêtes. Enfin nous avons vu que les colonies achéennes d’Italie y avaient apporté leur Déesse préférée. Le promontoire Lacinien, près de Crotone, possédait un temple magnifique où, lors des fêtes (panégyries), on affluait de toutes les cités de l’Italie hellénique.

Représentation primitive

Les plus anciennes représentations d’Héra semblent avoir été de simples troncs d’arbre comme celui que Clément d’Alexandrie cite à Théspies; à Samos une planche peinte, à Argos un bloc décoré de rubans recevaient également les hommages des fidèles de la Déesse. La première image à forme humaine aurait été celle que Dédale offrit à l’Héraeon d’Argos; on cite aussi celles que les Telchines donnèrent à lalysos et Camiros (Rhodes). Le plus ancien xoanon connu de Pausanias est celui de Tirynthe figurant la Déesse assise; attribué à Peirasos, il fut plus tard transporté par les Argiens dans leur temple. Il en existait un autre analogue dans la ville et plusieurs à Samos; dans cette île, ce seraient les colons ioniens qui auraient apporté les effigies anthropomorphiques d’Héra. Elle était représentée en costume de mariage : de nombreuses monnaies conservent l’image de cette statue, plus ou moins surchargée de bandelettes et de voiles. On cite encore des xoana à Olympie, Sparte, Mégalopolis, Coronée, etc.

Arrivés à l’époque de floraison de l’art hellénique, nous voyons les plus grands sculpteurs modeler la Déesse; Alcamène sur la route de Phalère; Praxitèle à Platées et Mantinée; Polyclète à Argos; Callimaque à Platées; Lysippe à Samos, etc. Le type fut fixé par l’oeuvre de Polyclète : il avait assis Héra sur un trône d’ivoire et d’or, lui mettant sur la tête une couronne où étaient figurées les Charites et les Heures; dans une main une grenade, dans l’autre un sceptre surmonté d’un coucou; auprès d’elle se tenait Hébé. Des monnaies argiennes ont conservé les traits généraux de cette statue. Comme toutes celles dont nous venons de parler, elle a été perdue. Il ne nous est parvenu que fort peu de statues d’Héra, et la plupart ont été défigurées par l’ignorance des restaurateurs, notamment en les surchargeant des attributs de Déméter (Cérès); inversement plusieurs statues dénommées Héra sont d’attribution fort incertaine.

Les représentations de la Déesse

Les statues se rapportent à deux types principaux : avec ou sans voile. Du premier on peut citer un marbre du Vatican, deux petits bronzes à Paris, Florence, où la Déesse est figurée les bras tombants (style attique); un marbre du Vatican, un marbre de Berlin, une statuette (bronze) de Vienne où elle est figurée, comme la Junon Capitoline, le bras droit levé, le gauche appuyé sur le sceptre.

Les statues avec voile sont plus nombreuses; à cette classe appartiennent: le torse d’Ephèse (académie de Vienne), les statues de Florence (jardins Roboli), de Naples, du Vatican; le corps est posé sur la jambe gauche; le bras droit est levé tenant le sceptre, le gauche tombe le long du corps; une autre série analogue montre Héra Téléia. Les principales statues sont : l’Héra Barberini (Rotonde du Vatican), celle du Braccio Nuovo (d’abord appelée Déméter), de la villa Borghèse (Juno Pronuba), du musée du Capitole (surmontée d’une tête de Lucilla); la pose est la même que pour les précédentes; mais la tunique sans manches découvre le haut de la poitrine, la main gauche écartée du corps tient une patère.

En dehors des statues, nous possédons un certain nombre de têtes et de bustes d’Héra. On en a exhumé une (en calcaire) à Olympie de style archaïque, la tête surmontée du polos, les yeux peints. Le buste de l’Héra Farnèse (musée de Naples) est d’une grande beauté; l’expression est sévère sans dureté; le buste colossal des Offices (Florence) est d’une expression sombre, due surtout au pli qui part des narines; l’Héra de Gugenti (British Museum) est plus douce. Le type accompli de la Déesse est celui du buste colossal de la villa Ludovisi; la haute couronne décorée de palmettes, un ruban d’astragales surmontent la chevelure disposée en ondes régulières. La dignité de l’expression, la pureté du profil, sont universellement admirées. On attribue cette oeuvre à la jeune école attique. Les deux autres bustes de la villa Ludovisi sont également remarquables, mais moins parfaits; l’un manque d’expression; l’autre, caractérisé par la hauteur de la couronne, a quelque chose de rêveur

Héra figure sur les bas-reliefs de la frise orientale du Parthénon et sur ceux du Théséion et d’un autel des douze Dieux (Athènes). Elle est représentée sur plusieurs peintures murales ou mosaïques dans les scènes du jugement de Pâris, généralement assise. Sur les vases peints, on trouve les principales scènes de sa légende : Héra trônant avec son mari, assistant au retour d’Héphaistos, à la naissance d’Athéna, au jugement de Pâris, le mariage de Zeus et d’Héra (figuré également sur les bas-reliefs, les peintures murales), etc.

Les attributs coutumiers d’Héra sont : le trône, la couronne, plus ou moins ornée; le sceptre, le voile, la patère, la grenade, le coucou, les ciseaux, le paon.

Zeus et Hera sur le Mont Ida

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